Accompagnements & soins
La toute-puissance soignante
L’enjeu du consentement aux soins
Le pouvoir des professionnels soignants sur les personnes malades, fragilisées, vulnérables est une réalité qu'il faut savoir regarder en face pour la faire évoluer.
L'enquête sur ces touchers vaginaux et rectaux pratiqués par les futurs médecins en formation sur des personnes malades endormies (anesthésiées), sans leur consentement, n'a pas du tout plu à la ministre de la santé. Alertée depuis février dernier par une cinquantaine de médecins (tombés malades ?), journalistes et féministes, Marisol Touraine a réagi face à ces "enseignements" permis dans certaines facultés de médecine en toute illégalité. Une mission a été confiée à l'IGAS pour y remédier et permettre un enseignement des futurs professionnels de santé dans le respect des droits des personnes malades (par simulation notamment).
La position du professionnel soignant doit l'interroger pour éviter la dérive de "toute-puissance". Il est le "sachant" face à la personne malade, qui devient vulnérable à son regard.
Tout l'enjeu repose sur le consentement des personnes, qui doit être obtenu et doit pouvoir être retiré.
Dans le secteur de l'aide aux personnes âgées, face à la fin de vie, cette notion de consentement aux soins fait encore défaut.
La future loi d'adaptation de la société au vieillissement (qui vient d'être votée au Sénat) va renforcer l'enregistrement du consentement des résidents qui entrent en Etablissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). La loi Clayes-Leonetti sur la fin de vie milite pour que les directives anticipées et la personne de confiance deviennent opposables aux médecins.
Les citoyens (patients, résidents actuels ou futurs) grandissent. Face au pouvoir soignant, ils organisent des contre-pouvoirs : associations de patients (Alzheimer, Parkinson, le CISS), association de résidents et de leurs familles (Voir la Fnapaef, l'Inter-CVS 91, les CRU : commissions de relation avec les usagers...). Ils apprennent à se mobiliser sur les réseaux sociaux. Ils donnent leur avis de clients (voir les avis dans l'annuaire Agevillage des maisons de retraite).
Je pense que les personnes qui avancent en âge seront de moins en moins enclines à supporter certaines dérives de toute-puissance.
Ils sauront de plus en plus affirmer et défendre (seules ou via leur "personne de confiance") ce qui est bon pour eux.
S'obliger à obtenir le consentement des personnes fragilisées demande d'abord une exigence éthique, du professionnalisme, du temps, des échanges réguliers avec la personne concernée, ses proches, en équipe pluridisciplinaire.
Il faut une philosophie de soin qui interdise tout "soin de force" (sans aucun consentement) et des techniques qui permettent 100% des soins en douceur (avec un consentement verbal ou non verbal de la personne malade). Les soins de force épuisent, y compris les soignants eux-mêmes.
Des établissements, des services à domicile, qui tendent vers ces principes existent. Ils se battent avec les contraintes budgétaires (la sous-budgétisation du Projet de loi de finance 2016 alerte les fédérations).
Parmi eux, une cinquantaine a choisi de s'engager vers le "Label Humanitude". Quatre sont labélisés. Ils attestent d'un prendre soin tout en douceur 24h/24, 7 jours sur 7. Venez les rencontrer ce 12 novembre à la Cité des Sciences à Paris, lors de la soirée de notre 8e colloque sur les approches non médicamenteuses.
Toute puissance rime avec vigilance.
Qui pour défendre les personnes âgées, handicapées, vulnérables, des pratiques inacceptables ?