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Politiques grand âge

Valeurs et points

Auteur Rédaction

Temps de lecture 3 min

Date de publication 10/07/2017

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Qualité versus Tarification

Annie de VivieUn nouveau tour de vis s'annonce pour les établissements (plutôt publics et associatifs) en convergence tarifaire dépendance.

Les acteurs de l'aide à domicile (indispensables dans le parcours de santé) ont été entendus mais ressortent sans solutions concrètes du cabinet d'Agnès Buzyn.

Dans un secteur notoirement sous-doté, ces arbitrages parfois brutaux révulsent les professionnels et devraient alerter les élus, les associations de consommateurs, de familles.

Ces professionnels sous tension, aux taux d'arrêts de travail pour TMS les plus élevés de France, risquent de s'épuiser d'avantage.

Ils sont pourtant plébiscités par les Français qui saluent leur courage, leur engagement à prendre soin des aînés, malgré tout.

Mais jusqu'où ?
Jusqu'à s'asseoir sur leurs valeurs professionnelles, éthiques, personnelles ? De bientraitance, de bienveillance, de qualité de prendre soin ?

Impossible d'accepter de pratiquer au long court des soins bâclés, à la chaîne, voire de force... Même si c'est ainsi que fonctionne l'institution depuis longtemps.
Impossible d'accepter de renier le sens de son métier pour la santé des personnes fragilisées, pour le soutien des proches aidants...
Impossible d'accepter des conditions de travail dégradées où l'on a plus de temps de parole, d'échanges.
Impossible aussi de ne pas rendre l'EPRD en temps et en heure.
Impossible de ne pas pallier les absences et de rester des heures dans son bureau sur les plannings et non pas auprès des équipes, auprès des plus vulnérables, au sein de groupes Balint (par exemple). Les peurs sont énormes : peur du regard des équipes en cas de report de soin, peur des familles si les toilettes ne sont pas terminées en temps et en heure, peur des arbitrages budgétaires...
Impossible de ne pas accueillir (subir ?) l'explosion des maladies neuro-dégénératives, l'épuisement des proches aidants, et ces épisodes caniculaires éreintants tous les organismes des tous âges.
Impossible d'assumer au long court des choix qui dépassent les professionnels.

Ces tensions asphyxient.
Elles asphyxient la pensée. Elles enferment dans les injonctions contradictoires.
Elles empêchent d'envisager d'autres pistes, d'autres prendre soin, d'autres visions plus durables, fondées sur des indicateurs différents (RSE), pour un prendre soin digne des personnes fragilisées et une qualité de vie au travail des professionnels digne aussi.
Quelle évolutions des métiers (comme les aides-soignants) ? Quel appel aux bénévoles (avec quels moyens, des levées de fonds ?) ? Quels projets d'animation ou plutôt quelle dynamique de vie sociale ? Quelle défense de la citoyenneté des plus fragiles... Des expériences déjà portées par des figures comme Paulette Guinchard qui quitte la présidence de la CNSA, se pérennisent difficilement dans le quotidien des services.
L'évidence de bientraitance des uns et des autres (personnes aidées, professionnels) devient une injonction insupportable.

Stop.
L'urgence est de se poser.
Se poser pour regarder ces souffrances (qui font peur).
Se poser pour tenter de les soulager doucement, pas à pas, en commençant par les plus prégnantes, celles qui bousculent le plus les valeurs.
Se poser pour objectiver ces réalités, les mettre en mots, les rendre lisibles et les soumettre aux décideurs. Je ne peux imaginer que les valeurs des professionnels soient antinomiques avec les valeurs des autorités qui arbitrent ces autres "valeurs du point" (Gir, Pathos...).
Se poser pour décider des actions prioritaires : le sursaut espéré par Claudy Jarry pour la qualité de vie des plus vulnérables avec la qualité de vie au travail des professionnels, une pétition vers le Président de la République...
Se poser pour lancer l'alerte ?

Parce qu'on ne tient pas longtemps en reniant ses valeurs.
L'absentéisme déjà terrible de notre secteur risque encore de s'emballer.

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