Accompagnements & soins
Légiférer en tremblant sur la fin de vie, sans hésiter sur le grand âge
Lors d'un webinaire de l'Association tarnaise de gérontologie, le philosophe et professeur Jacques Ricot a pointé les risques de dérives en cas d'une nouvelle loi sur la fin de vie.
Pourquoi légiférer quand quatre lois en 17 ans n'ont pas été au bout de leurs engagements pour le déploiement d'une culture palliative sur le territoire ?
Serait-ce la transition démographique qui s'accélère et exige des arbitrages financiers ?
Citant le doyen Jean Carbonnier, nous ne pouvons que le suivre quand il invite les politiques à légiférer en tremblant sur ces enjeux aux dérives constatées dans les pays qui pratiquent l'euthanasie et le suicide assisté.
Sans oublier le peu de médecins enclins à réaliser les actes. Quel professionnel alors sera amené à le faire quand la crise des vocations touche tous les secteurs de l'aide et du soin ?
Vraiment ce calendrier pose question : pourquoi annoncer un projet de loi en septembre et un plan Soins palliatifs pour fin 2023, début 2024... Sans oublier les renoncements perpétuels concernant une loi Grand âge structurante et positive en termes de retour sur investissements.
Au lendemain de la journée de solidarité, force est de constater que les 3,2 milliards d’euros générés ne suffisent pas à financer les besoins qui vont aller croissants avec la transition démographique (vieillissement).
La CNSA issue de cette journée de solidarité a grandi. Elle est ainsi devenue en 2020 la 5eme branche de protection sociale avec un budget de 38,6 milliards d’euros cette année. Reste que les difficultés sur le terrain sont légion : pour aider à vieillir debout quel que soit le lieu de vie, le territoire, avec des professionnels aux métiers valorisés, reconnus, financés, dans des services et établissements coordonnés, interconnectés, ressources et donc là aussi financés.
D'autant que des impacts médico-économiques positifs sont possibles si la culture change, si une loi grand âge structurée, structurante, financée se déploie, jusqu'aux services territoriaux de l'autonomie.
Des pistes existent, mais restent parcellaires, en mode expérimentation, non enseignées en formations initiales pour un déploiement plus intense, non financées, non pérennisées. Quel gâchis au risque de désespérer les citoyens terrifiés à l'idée d'un vieillissement, d'une fin de vie peu, mal accompagnés.
Je pense cette semaine aux interventions non médicamenteuses (INM) dont le déploiement semble intéresser les politiques aujourd'hui. Grégory Ninot viendra présenter ses travaux et celles qui boostent l'autodétermination avec enthousiasme à notre prochain colloque Agevillage/Humanitude sur les approches non médicamenteuses. Nous y remettrons les labels Humanitude de l'année à des équipes qui se battent pour monter que d'autres récits autour de la fin de vie sont possibles. Des avancées qui ne seront pas démenties par les ouvrages professionnels que la rédaction a lu pour vous cette semaine.
Oui des impacts d'une culture positive de la fin de vie sont possibles en écho à la feuille de route du développement durable dans notre secteur.
Mais parce que "le droit n'est pas cet absolu dont nous rêvons" comme le soulignait le doyen Carbonnier, "mieux vaut légiférer en tremblant" sur ces enjeux de fin de vie, mais sans trembler sur l'accompagnement du grand âge dont les urgences sont cruellement rappelées chaque jour.
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