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Qualité & management

Les soignantes plus fréquemment victimes de violences sexistes et sexuelles au travail

Auteur Raphaëlle Murignieux

Temps de lecture 3 min

Date de publication 18/12/2024

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Les chiffres font froid dans le dos : deux enquêtes publiées la semaine dernière montrent que les infirmiers comme les médecins subissent lourdement les violences sexistes et sexuelles (VSS). Gros plan sur les outils et ressources pour les prévenir ou y réagir.

Une consultation menée par l’Ordre national des infirmiers auprès de 21 000 professionnels, dont 19 000 femmes, révèle que près de la moitié d’entre eux ont déjà été victimes de VSS – 53 % chez les infirmières, et 24 % chez les infirmiers.

Il s’agit principalement de réflexions inappropriées ou dégradantes du fait de leur genre (39 %) et d’outrages sexistes, qui consistent à imposer à une personne un propos ou un comportement à connotation sexiste ou sexuelle, qui porte atteinte à sa dignité ou qui l'expose à une situation intimidante, hostile ou offensante (21 %).

4 % déclarent avoir subi des agressions sexuelles, et 0,13 % des viols, ce qui représente tout de même plus de 1000 victimes.

« Les violences sexistes et sexuelles touchent énormément d’infirmières et d’infirmiers. Ils les subissent dès leur formation, et cela les poursuit tout au long de leur carrière, quel que soit leur mode d’exercice. Face à cela, la culture du silence est encore trop forte. Trop souvent, les professionnels n’osent pas réagir, ou ne savent pas comment le faire », commente Sylvaine Mazière- Tauran, présidente du Conseil national de l'ordre des infirmiers. Une situation grave contre laquelle il faut agir, poursuit-elle, notamment en faisant connaître leurs droits aux infirmières et infirmiers, ainsi que les accompagnements possibles.

Côté médecins, c’est une enquête menée en 2024 par Medscape auprès de 1000 soignants exerçant en France qui met en lumière « des données alarmantes concernant les comportements inappropriés à caractère sexuel » dans le cadre professionnel.

En particulier des faits relevant du harcèlement sexuel pour près d’un médecin sur 16 (6 % environ), une tentative de viol dans environ 1 cas sur 11 (9 %), et un viol dans 1 cas sur 16 (6,25 %).

Certaines catégories sont plus vulnérables : 10 % des médecins de moins de 45 ans et 8 % des femmes médecins rapportent avoir été victimes entre 2021 et 2024.

Avec chez les infirmiers comme chez les médecins de lourds impacts sur leur vie professionnelle et personnelle : sentiment d’insécurité au travail, détérioration des relations avec certains collègues… A noter que 12 % des infirmiers et 23 % des médecins victimes ont quitté leur travail.

Sans grande conséquence pour les agresseurs : chez les médecins, la moitié des victimes n’ont pas signalé les faits. De même, 38 % des infirmiers n’ont entrepris aucune démarche.

En cause, la culture du silence, la peur des représailles et le manque de soutien de la part des collègues.

Pourtant, l’employeur est tenu par le Code du travail de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ».

Il doit écouter et protéger la victime, mais aussi mener une enquête interne pour faire cesser la situation de violence et sanctionner le cas échéant son ou ses auteurs, sans attendre un dépôt de plainte ou un jugement pénal.

Dans les entreprises et établissements de plus de 20 salariés, le règlement intérieur doit par ailleurs préciser la procédure à suivre par les victimes ou les témoins. Dans les entreprises de 250 salariés ou plus doit en plus être désigné un référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel.

Les fonctionnaires peuvent quant à eux demander la protection fonctionnelle.

Enfin, les structures publiques (collectivités) doivent mettre en place « un dispositif de signalement qui a pour objet de recueillir les signalements des agents qui s'estiment victimes d'un acte de violence, de discrimination, de harcèlement moral ou sexuel ou d'agissements sexistes et de les orienter vers les autorités compétentes en matière d'accompagnement, de soutien et de protection des victimes et de traitement des faits signalés ».

Mais pour agir contre les VSS, il faut déjà savoir les identifier. De nombreuses ressources existent, proposées notamment par le Collectif Nous Toutes, le centre francilien Hubertine Auclert, l’Agence nationale d’amélioration des conditions de travail (Anact) ou encore l’Association européenne contre les Violences faites aux femmes (AVFT).

Des pistes à retrouver dans notre dossier consacré aux violences sexistes et sexuelles au travail.

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