Accompagnements & soins
Profession essentielle : 17 mars, première journée nationale des aides à domicile
De l'INRS à l'Una en passant par tous les acteurs de l'aide et du soin à domicile, le message est le même : la spirale infernale est enclenchée. Les 570 000 professionnels (très majoritairement des femmes) s'épuisent. Elles ne viennent plus exercer ces métiers et les plans d'aides ne sont plus honorés totalement. Est-ce que la journée nationale des aides à domicile ce 17 mars changera la donne ? Est-ce que la campagne d'affichage "Votre engagement nous est essentiel. Merci !" va porter ses fruits ? C'est ce qu'espère le ministre Jean-Christophe Combe et le Collectif des professionnels de l'aide et du soin à domicile pour des mesures concrètes emmené par Dafna Mouchenik. Les services vont ouvrir grand leurs portes pour tenter de valoriser les magnifiques métiers du lien. De quoi se mettre dans la peau de ces professionnels (à plus de 90 % des femmes) indispensables, essentiels. En mode "vis ma vie" pour soutenir (enfin) une approche domiciliaire financée des situations à risque de vulnérabilité partout sur les territoires ?
Une journée nationale qui ne doit pas masquer les difficultés
La dernière étude épidémiologique réalisée à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) est alarmiste pour les salariés du secteur de la santé et de l’aide à la personne : le risque d’accident du travail est multiplié par 4 au regard de la forte exposition des facteurs physiques (port de charges lourdes, postures contraignantes…) combinée à la forte exposition des facteurs psychosociaux (intensité du travail, charge émotionnelle, manque d’autonomie...).
Cette étude a été menée à l’INRS à partir de l’exploitation des données de l’enquête Conditions de travail, réalisée par la Dares entre 2013 à 2016. Les résultats révèlent que des horaires contraints, irréguliers et imprévisibles, une mauvaise conciliation vie professionnelle/personnelle et des mesures de prévention insuffisantes sont des facteurs organisationnels associés aux taux d’accidents du travail les plus élevés dans ce secteur. Les fonctions d'aide-soignant et d'agent des services hospitaliers sont également associées à des taux d’accidentsexcessifs.
Une présentation de ces travaux aura lieu lors du colloque INRS Organisation du travail et risques psychosociaux : les apports de la recherche, le 27 juin 2023 à la Maison de la RATP à Paris.
Malgré les initiatives des professionnels, les structures d’aide et de soins à domicile sont entrées dans un cercle vicieux et ne peuvent plus faire face aux besoins de tous les Français, estime l'observatoire Una-Aesio-Macif-Harmonie Mutuelle-OpinionWay.
"Malgré les alertes faites sans relâche auprès des pouvoirs publics depuis 2018, la situation est plus critique que jamais. 1 demande de prise en charge sur 10 doit être refusée et 1 demande sur 4 ne peut pas être prise en charge intégralement (1 sur 5 en 2020). Et pourtant, les études démographiques de l’Insee démontrent que les besoins ne cessent de progresser."
Sur 11 postes à pourvoir, 7 sont des auxiliaires de vie/AES et 1 des aides-soignants.
De son côté, l'AD-PA (association des directeurs au service des personnes âgées) souligne que les services à domicile privés commerciaux vont pouvoir augmenter leurs tarifs de 7 %, alors que les départements contraignent les services associatifs et publics à des augmentations inférieures à 2 % alors que l'inflation et de 6 à 7 %.
"En 2023 les pouvoirs publics organisent donc la baisse des moyens dans les services à domicile non lucratifs qui représentent 70 % de la profession. De nombreux services sont déjà en déficit. Beaucoup plus le seront à la fin de l'année. En 2016 l'Etat considérait qu'à l'époque l'heure d'aide à domicile devait d'être financée à 24 €. Elle l’est aujourd'hui à peine à 23 €".
Pour l’AD-PA, l'heure d'aide à domicile doit aujourd'hui être financée à hauteur de 30 € "pour pouvoir accompagner dignement les personnes âgées, rémunérer correctement les professionnels et faire baisser le taux d'accidents du travail qui reste le plus élevé de toute l'activité économique française".
Une journée nationale pour pallier le manque de reconnaissance de ces professions essentielles, en voitures de fonction et 100 % formées !
L'observatoire constate la concurrence vive entre structures et établissements pour recruter des professionnels, mais 88 % des directeurs de structures interrogés déclarent que le manque de reconnaissance salariale est le premier facteur expliquant les difficultés de recrutement.
L’absentéisme et les difficultés de remplacement ainsi que les conditions de travail sont les 2ème et 3ème raisons invoquées par les directeurs de structures, respectivement à 87 % et 85 %.
Les initiatives se multiplient sur le terrain : assouplir les horaires de travail et les plannings, développer une communication proactive sur les réseaux sociaux pour toucher des candidats différents, faire appel à de nouveaux profils que les services forment aux métiers de l’aide et du soin à domicile.
Concernant la mobilité des aides à domicile, là aussi les initiatives pleuvent comme celle du conseil départemental de la Dordogne qui fournit 1 300 véhicules de fonction aux aides à domicile du département.
Des voitures floquées mises à disposition 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, qui sont aussi un atout pour le recrutement.
Mais selon l'observatoire, pour plus de 9 directeurs sur 10, il est avant tout nécessaire d’améliorer les conditions de travail (96 %), s’assurer une meilleure prise en charge des indemnités kilométriques (94 %), de disposer d’une meilleure tarification des services d’aide à domicile (93 %).
"Il convient de diplômer 100 % des aides à domicile déjà en poste, soit 200 000 professionnelles en
assurant l’accès à un diplôme qualifiant (a minima de niveau 3) et en
garantissant le financement de leur remplacement. Nous aurons également à
former 250 000 nouvelles auxiliaires de vie d'ici à 2040" rappelle Dafna Mouchenik, directrice de service et porte-parole du collectif Domicile*, saluant la tribune dans Le Monde de Thibault de Saint Blancard (Alenvi).
*Lien d'inscription à la plateforme du Collectif des professionnels de l'aide et du soin à domicile pour des mesures concrètes.
Contact : dafna.mouchenik@logivitae.fr
Votre engagement nous est essentiel. Merci !
Affiches, vidéos : la campagne de communication lancée par le gouvernement va se déployer le 17 mars pour la journée nationale des aides à domicile.
Et pour soutenir le recrutement des postes vacants, le gouvernement rappelle avoir lancé plusieurs actions dans le cadre du Plan métiers du grand âge et de l’autonomie :
- Des campagnes nationales de recrutement sous l’égide des préfets et des ARS et en partenariat avec l’ensemble des acteurs du service public de l’emploi.
- Des actions pour attirer de nouveaux publics : en direction des jeunes talents (Plan jeunes #1jeune1Solution, missions de services civiques solidarité aux seniors), en direction des demandeurs d’emploi (formations courtes, contrats aidés, périodes de mises en situation professionnelle), en direction des publics éloignés (dispositif de découverte des métiers du grand âge pour les personnes éloignées de l’emploi et les personnes réfugiées).
- 20 plateformes des métiers de l'autonomie dans les territoires financées par l’Etat, pour faciliter la promotion locale des opportunités professionnelles.