Rétrospective 2023 : une année de crises de confiance, financières, des métiers, climatique, de sens
L'année 2023 restera gravée comme une année de crises multiples, cumulées, épuisante pour les professionnels du grand âge. Comme si 20 ans après la canicule de 2003, l'adaptation de notre société à son vieillissement n'était toujours pas une évidente priorité des politiques publiques. Retour sur une année de crises de confiance, financières, des métiers, climatique, de démocratie médico-sociale, de sens.
Crise de confiance
Avec l’accord Caisse des dépôt/Orpea qui a eu du mal à passer et de nouvelles plaintes contre des groupes privés et des structures publiques (cf. les annonces de Sandrine Bonnaire en fin d'année), Didier Sapy de la Fnaqpa est très inquiet de la désespérance du secteur, mais reste déterminé pour une loi de programmation pluriannuelle.
La Défenseure des droits appuie les demandes des professionnels et souhaite un ratio de 8 professionnels pour 10 habitants en Ehpad.
Pour retisser la confiance, l’évaluation obligatoire HAS a été lancée en 2023. Le démarrage demande dans un premier temps de choisir son organisme certificateur, Agevillagepro en a fait un webinaire.
Pour sortir de la complainte et convaincre, le Synerpa se mobilise après le départ de sa déléguée générale Florence Arnaiz-Maumé.
Il trouvera des labels à la rescousse dont celui de l’Humanitude qui a été décerné à 6 nouveaux labellisés et renouvelé pour 3 autres structures en novembre.
Crises financières
Les déficits se creusent partout sur les territoires, dans tous les ESMS, malgré les boucliers tarifaires face aux hausses des coûts des énergies.
Ces crises invitent à ne pas perdre une miette des aides de l’Etat, ici pour l’évolution des logiciels métiers d’ici février 2024 et booster sa cybersécurité.
Reste que les tensions épuisent les parties prenantes et que les vieux méritent mieux ! s’insurge la Fnadepa.
Le report de la PPL Bien Vieillir a été un très mauvais signal, mais sa reprogrammation en novembre a poussé la nouvelle ministre Aurore Bergé à sortir sa stratégie « Bien vieillir ». Celle qui a succédé à Jean-Christophe Combe a pesé de son poids politique pour mobiliser une vingtaine de ministres en vue d’une politique interministérielle (santé, logement, territoires, sports, culture…).
Elisabeth Borne a quant à elle débloqué 100 millions d’euros début août pour des fonds d’urgences. Ils ont été pris d’assaut au point qu’Aurore Bergé a obtenu une rallonge de plus de 600 millions en décembre, mais aussi l’annonce d’une loi de programmation pour 2024.
Crise des métiers
Les postes restent malheureusement vacants au point d'épuiser encore les équipes en place et de ne pas couvrir les plans d’aides des personnes en situations de vulnérabilité.
La crise est telle que l’avenir des services est en danger, rappelle l’Una au risque de créer des déserts médico-sociaux après les déserts médicaux.
Pour y faire face, des CPTS, communautés professionnelles territoriales de santé, mobilisent les forces du terrain, y compris les aides à domicile en première ligne chaque jour. La loi immigration fait hurler les employeurs d’intervenants à domicile d’origine étrangère comme Dafna Mouchenik au sein du collectif Domicile.
La CNSA réagit et labellise une vingtaine de plateformes des métiers de l’autonomie ainsi que 18 départements préfigurateurs du « service public territorial de l’autonomie, SPTA » imaginé par Dominique Libault. Cette volonté fait écho à cette étude européenne (TICC) pour des soins intégrés sur les territoires ainsi qu'au déploiement acté en 2023 des services autonomie à domicile rapprochant les Saad et les Ssiad.
Parce que tout se joue sur les territoires : le Réseau francophone des territoires et villes amis des ainés a réuni en décembre15 pays pour partager leurs meilleures pratiques. Comme celles d’assumer qu’accompagner les situations de grande fragilité, c’est à risques de maltraitance : l’augmentation des signalements d’EIGS est un bon signe ... à confirmer !
Avec des pistes comme les interventions non médicamenteuses telle Carpe diem qui se déploie, un plan anti-chute et les interventions de nos colloques annuels Agevillage/Humanitude en novembre à Paris sur les approches non-médicamenteuses (ANM).
Crise climatique vers la décarbonation du secteur du grand âge
Le Shift Project a été missionné pour aider à la décarbonation de la branche autonomie, y compris dans la restauration où il faudra baisser la consommation de viande tout en luttant contre la dénutrition, dont la semaine nationale a lieu en novembre.
10 ans après la canicule : les Villes amies des aînés inspirent nos territoires qui chauffent.
Les professionnels du grand âge peuvent s'appuyer sur l’Abécédaire du développement durable en santé pour se décarboner, en identifiant les gisements de gaspillage.
Crise de la démocratie médico-sociale, crise du sens
Comment peut-on accepter que les lois (nationales) s’appliquent différemment selon les territoires ? Un exemple en 2023 : la Fédésap constate qu’un département sur quatre n’a pas attribué la dotation qualité aux services d'aide aux domiciles.
Les zones de non-droits sont telles qu’un rapport dessine un droit de visite opposable en Ehpad !
Les premiers concernés, les vieux, se prennent en main.
Alors que les plus âgés peinent à défendre leurs droits et lutter contre l’âgisme, le Cnav, collectif national autoproclamé de la vieillesse, a réussi son contre-salon des vieux : #Rienpourlesvieuxsanslesvieux. On y a beaucoup parlé habitats, Ehpad avec une démocratie interne à repenser avec des CVS reboostés. Les ESMS apprennent à booster leur démocratie interne avec ces CVS vitaminés. Certains se transforment en collectivité où les habitants ont le pouvoir d’agir, de décider
comme l’Ehpad de la Croix rouge russe de Nice, labellisé Humanitude, récompensé par un Trophée Directions 2023.
Nul doute que les vieux concernés comme les professionnels en première ligne vont se saisir des outils pour que les personnes avec troubles cognitifs puissent décider, pour que la commission de menus sorte du bureau des plaintes.
Nourrir la démocratie en médico-social demande aussi de nourrir des espaces de délibération du travail face aux souffrances des soignants, à leurs stratégies de défense. La métaphysique du Tübbe du nom de cette démarche d’origine suédoise, vise à aligner valeurs et organisations
2023 a vu les états généraux des maltraitances inviter à moraliser sans démoraliser. En cas de situations critiques : on apprend à dénoncer et à énoncer des propositions. Les professionnels s’appuient sur des vidéos pédagogiques en faveur de la bientraitance du Forap et de l’HAS pour analyser leurs pratiques.
Des espace de réflexion éthique se montent au sein des ESMS inspirés de 8 pistes concrètes.
Reste que les soignants de terrain traversent une crise du sens de leurs métiers. Une crise sans précédent, à l’instar du collectif vent debout contre la loi pour une aide active à mourir qui a circulé fin 2023, invitant les soignant à devenir des secouristes à l’envers !
Et si les travaux de la saison 1 du Laboratoire des solutions de demain (LSD) composés d'un manifeste, d'outils de dimensionnements pour les financements, de guide pour des tiers-lieux, de design, inspiraient les professionnels en 2024 ?
Pour des solutions pratiques, financées, dotées qui aident à vieillir debout, partout, malgré tout (malgré les maladies neurocognitives comme celle à corps de Lewy ), jusqu’au bout !
Vous pourrez compter sur la rédaction d’Agevillagepro.com pour vous informer, relayer les initiatives qui donnent du sens !