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Qualité & management

Tarifs différenciés en Ehpad : la hausse de 35 % jugée trop élevée

Auteur Raphaëlle Murignieux

Temps de lecture 3 min

Date de publication 08/01/2025

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Encore un décret daté des toutes dernières heures de 2024 : depuis le 1ᵉʳ janvier, la possibilité de pratiquer des tarifs différenciés selon que le résident relève ou non de l’aide sociale à l’hébergement est effective. Une mesure de la loi bien vieillir d’avril 2024, qui fait grincer des dents nombre de particuliers.

La question ne date pas d’hier, et certains établissements avaient déjà franchi le pas, notamment ceux du Groupe SOS seniors. En effet, dans les Ehpad habilités à l’aide sociale, tous les résidents bénéficient du tarif social, alors que seulement 1 résident sur 4 y est éligible.

Depuis 2005, le législateur permettait donc aux établissements de pratiquer des tarifs hébergement différents (ordonnance Borloo du 1ᵉʳ décembre 2005), mais uniquement s’ils remplissaient des conditions bien précises, à savoir être habilités pour 50 % de leurs places ou plus, et avoir accueilli moins de 50 % de bénéficiaires de l’aide sociale sur les trois exercices précédant la demande. Il fallait par ailleurs signer une convention d’aide sociale avec le Département, pour encadrer le tarif différencié.

Le décret du 31 décembre 2024, pris en application de l’article 24 de la loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie, simplifie considérablement le processus.

Depuis le 1ᵉʳ janvier, il n'est plus nécessaire de signer une convention d’aide sociale pour pratiquer des tarifs différents, sauf si la part de résidents au tarif social descend en dessous des 25 %. Une mesure qui vise à limiter le risque d’éviction de nouveaux résidents bénéficiaires de l’ASH.

Le texte fixe aussi l’écart maximal entre le tarif aide sociale et le tarif appliqué aux résidents non éligible à l’ASH à 35 %. Soit une augmentation d’un peu plus de 20 euros par jour en moyenne.

Et c’est surtout ce taux qui fait réagir dans la presse grand public.

« La potion risque d’être amère pour une partie des pensionnaires d’Ehpad », peut-on ainsi lire dans Le Monde. L’hebdomadaire Marianne estime pour sa part que « le gouvernement Bayrou fait les poches des personnes âgées qui entrent en Ehpad ».

Dans un avis rendu en décembre, le Conseil de l’âge du HCFEA formule un avis plus nuancé.

S’il concède que la modulation des tarifs selon les revenus des résidents va permettre aux établissements « de retrouver des marges en recettes sur la section hébergement, dans un contexte qui se caractérise à la fois par des tarifs d’aide sociale modestes et par un moindre nombre de résidents admis à l’aide sociale à l’hébergement que celui des places habilitées », il note cependant que le taux retenu est particulièrement élevé et plaide pour un taux plafond de 15 % au maximum.

D’après ses calculs, même une augmentation plus modeste des tarifs, de 10 euros/jour, constituerait une baisse de 14 à 17 % du niveau de vie des personnes non-éligibles à l’ASH, mais dont les revenus ne sont pas suffisants pour bénéficier pleinement de la réduction d’impôts de 25 % des dépenses (de dépendance et d’hébergement) réalisées.

Soit les retraités dont les revenus annuels sont compris entre 22 000 et 28 000 euros en 2020, qui comptent pour plus de 40 % des retraités.

Le Conseil de l’âge regrette aussi le seuil de 25 % de bénéficiaires de l’ASH, en dessous duquel l’Ehpad doit signer une convention d’aide sociale avec le conseil départemental, arguant qu’il ne correspond pas aux réalités de certains territoires, selon qu’ils sont plus ou moins bien pourvus en places habilitées.

Il estime également qu’ « outre la question du niveau de ce seuil, un complément important devrait être apporté au travers d’une obligation, mise en œuvre à l’échelle départementale, pour les établissements de répondre en priorité aux demandes de bénéficiaires de l'ASH ou d’une interdiction de leur refuser une demande d’admission s'il reste des lits disponibles ».

Pour rappel, l’ensemble des Ehpad publics sont habilités à l’aide sociale (dont 93 % sous habilitation totale), 91 % des établissements privés non lucratifs et 42 % des Ehpad commerciaux.

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